FESTIVAL PARIS CINEMA 2010 PARIS — 15 juillet 2010
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Après délibérations (mouvementées et à rebondissements dignes de « 12 hommes en colère » concernant notre jury) les différents jurys du festival ont décerné leur palmarès parmi les 8 films de la compétition internationale suivants :

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« Alamar » du Mexicain Pedro Gonzalez-Rubio dont je vous ai déjà parlé (ici) film dans lequel la beauté, la simplicité, la richesse d’une nature sauvage font écho à celles de la relation entre un père et son fils qui vivent à son rythme, une rencontre à la fois simple, universelle et magique entre ces deux hommes et entre des Hommes et la nature. Une parenthèse enchantée empreinte d’une lumineuse nostalgie qui vous ensorcelle progressivement bien après la projection et qui m’a laissé une forte empreinte comme on imagine que ces quelques mois agiront dans la mémoire du petit garçon qui s’ouvre au monde et à sa fragile beauté que ce film éclaire magnifiquement. Il interroge aussi les notions de fiction et documentaire et, à l’image de sa très belle mise en image du titre, celle de cinéma « fenêtre ouverte sur le monde »…ou sur la mer.

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« Le Braqueur » de l’Allemand Benjamin Heisenberg dans lequel Johann Rettenberg, coureur de marathon et braqueur de banque est en fuite perpétuelle qui le condamne à une impossible liberté et à continuer malgré tout à la quérir, même à bout de souffle. Une course effrénée, rageuse et vaine pour la liberté d’un être opaque parfaitement interprété qui finira par laisser filtrer une lueur d’humanité.

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« Cleveland contre Wall Street » du Suisse Jean-Stéphane Bron qui raconte l’histoire d’un procès qui aurait dû avoir lieu, celui de la ville de Cleveland contre Wall Street. Le film organise un procès de cinéma dans une reconstitution des conditions réelles, avec participation des vraies victimes des subprimes. Le procédé vain décrédibilise le propos, pourtant passionnant, et est beaucoup plus pédagogique (voire démagogique pour ne pas dire poujadiste quand il désigne le président américain comme impuissant à résoudre la crise) que cinématographique.

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« If I want to whistle, I whistle » du Roumain Florin Serban (dont je vous ai déjà parlé plus longuement, ici) dans lequel Silviu, un jeune délinquant de 18 ans, attend sa libération de la maison de redressement où il termine sa quatrième et dernière année d’emprisonnement.  Seulement, après une longue absence, sa mère est rentrée d’Italie pour emmener son petit frère avec elle. Il la tient pour responsable de sa situation et ne veut pas que son frère vive la même chose. Son enfermement devient insupportable. Pris de panique, il kidnappe Ana la jeune assistance sociale dont il est tombé amoureux. La caméra à l’épaule au plus près de Silviu, au plus près de sa fébrilité, de sa rage qui affleure, des tourments qui le hantent, de la déraison qui le menace, nous plonge entre ces quatre murs qui l’oppressent, à cette liberté qu’il enrage de retrouver. Le film doit beaucoup à son acteur principal, George Pistireanu au mélange de force, de fragilité, de tension qui émanent de son regard et de ses gestes. Florin Serban le filme comme un animal sauvage, apeuré, dont la violence est, à ses yeux, une question de survie. Un huis-clos haletant et fiévreux, tout en forces et fragilités, sur la fureur de vivre et d’être libre que la caméra de Florin Serban sait si bien débusquer dans le regard de son talentueux acteur principal. Après « Un Prophète » de Jacques Audiard, la prison et le sentiment de révolte qui l’anime n’a visiblement pas fini d’inspirer les cinéastes et de procurer à leurs films une rage fascinante.

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« Mundane history » du Thaïlandais Anocha Suwichakornpong sur les relations entre une jeune paralysé par un accident, Ake, et son infirmier. Le film est traversé de scènes hypnotiques et envoûtantes qui contrastent avec la sobriété, l’austérité des scènes entre le jeune homme et son infirmer et symbolisent l’échappatoire que celui-ci se construit progressivement au contact de ce dernier. Un film déconcertant avec de brillantes références (« 2001 Odyssée de l’espace ») et d’obscures paraboles (sur la situation en Thaïlande). Un film hypnotique et allégorique qui oppose l’infiniment petit (l’homme impuissant physiquement et socialement) à l’infiniment grand (le cosmos).

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« La rivière Tumen »  est un film sud-coréen réalisé par Zhang Lu. La Rivière Tumen est celle qui marque la frontière entre la Chine et la Corée du Sud. C’est dans cette région au climat rigoureux de laquelle ses habitants cherchent à fuir que les drames se confrontent, que les incompréhensions et les malheurs s’entrechoquent. Un film judicieusement glacial et glaçant qui nous fait appréhender l’âpreté de la vie de ses habitants. Une vie qui semble sans espoir et dont la puissance du hors champ (que ce soit celui de la situation politique qui n’est que brièvement évoquée par le prisme de l’écran de télévision ou celui de drames personnels) renforce encore le sentiment d’oppression politique, sociale, physique. La rigueur de la mise en scène fait écho à la vie rigoureuse des habitants. La violence, subite, terrifiante, éclate comme un terrible appel à l’aide et le hors-champ comme un appel au regard, celui du reste du monde qui détourne peut-être parfois trop facilement les yeux.

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« Sawako decides » du Japonais Yuya Ishii. La Sawako en question enchaîne les boulots d’intérimaires et subit sans cesse les humiliations de ses patrons et collègues. Sa solution de repli et ses refuges : l’apathie, les canettes de bière, le défaitisme. Entre humour scatologique et absurde, Yuya Ishii a choisi le rire grinçant pour dénoncer une société visiblement en perte de repères, une société qui exclut plus qu’elle ne rassemble et en déliquescence, qu’il s’agisse de la cellule familiale, de la Société dans son ensemble ou de l’entreprise. Le manque total de subtilité nuit au rire et au propos. Le seul film de cette compétition que je ne souhaitais absolument pas voir figurer au palmarès.

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« Sweet little lies » du Japonais Hitoshi Yazaki : la vie d’un couple en apparence parfaitement harmonieuse. Chacun des époux entame une liaison… Yazaki a voulu traiter avec humour les petits mensonges quotidiens tout en parsemant son film de poétiques métaphores. Vérité, quotidien  et passion sont-ils compatibles ? Hitoshi Yazaki tente d’y répondre avec tendresse, humour, poésie. Quelques belles images éclairent ce film attachant qui aurait gagné à être plus court et mieux rythmé.

S’il fallait établir des points communs entre les différents films de la compétition ce serait une quête de liberté, qu’elle soit amoureuse ou sociale et une réalité suffocante, un sentiment d’impuissance face une situation politique, sociale, physique, amoureuse paralysante. Peut-être à l’image d’un monde sclérosé et en crise qu’un film évoquait d’ailleurs explicitement. Une sélection de bonne qualité qui donne néanmoins des envies d’ailleurs et dans laquelle « Alamar » ressortait comme une lumineuse et salutaire fenêtre ouverte, sur le monde certes mais aussi sur l’espoir. L’espoir : le grand oublié du cinéma actuel…

PALMARES

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PRIX DU JURY

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La Rivière Tumen de Zhang Lu

PRIX DES ETUDIANTS

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LA Rivière Tumen de Zhang Lu

PRIX DES BLOGUEURS

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Le Braqueur de Benjamin Heisenberg

PRIX DU PUBLIC

Cleveland contre Wall Street de Jean-Stéphane Bron

Une soirée qui clôturait donc 12 jours intenses et de très belles découvertes cinématographiques dont les meilleurs moments sont les suivants : « Amore », « Les amours imaginaires », « Un homme qui crie » (je vous en parlerai plus tard mais je ne comprends pas que le jury cannois ait préféré attribuer la palme d’or à Apichatpong plutôt qu’à ce film), « You will meet a tall dark stranger », « Alamar », « If I want to whistle, I whistle », la master class incroyable de la tout aussi incroyable Jane Fonda, la projection des « Félins » de René Clément (dont je vous parlerai également plus tard) et de passionnants débats cinéphiliques. Je ne reviendrai en revanche pas sur le film de clôture : « Tamara Drewe » de Stephen Frears, la plus grande déception de ce festival.

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Merci encore à Paris Cinéma de m’avoir permis de vivre pleinement cette édition 2010 et merci à Alexandra, Anne, Dimitri, Aude, Adrien, Mathilde pour leur chaleureux accueil et pour cette belle nouvelle expérience d’immersion festivalière.

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Ci-dessus, le quartier général du festival…

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Sandra Mézière

Blogueuse et romancière. Diplômée en droit, sciences politiques, médiation culturelle (mémoire sur le cinéma avec mention TB) et d'un Master 2 professionnel de cinéma. 15 fois membre de jurys de festivals de cinéma (dont 10 sur concours d'écriture). 22 ans de pérégrinations festivalières. Blogueuse depuis 14 ans. Je me consacre aujourd'hui à ma passion, viscérale, pour le cinéma et l'écriture par l'écriture de 7 blogs/sites que j'ai créés ( Inthemoodforfilmfestivals.com, Inthemoodforcinema.com, Inthemoodfordeauville.com, Inthemoodforcannes.com, Inthemoodforhotelsdeluxe.com, Inthemoodforluxe.com... ), de romans, de scénarii et de nouvelles. en avril 2016, a été publié mon premier roman au cœur des festivals de cinéma, aux Editions du 38: "L'amor dans l'âme" et en septembre 2016, chez le même éditeur, mon recueil de 16 nouvelles sur les festivals de cinéma "Les illusions parallèles". Pour en savoir plus sur mon parcours, mes projets, les objectifs de ce site, rendez-vous sur cette page : http://inthemoodforfilmfestivals.com/about/ et pour la couverture presse sur celle-ci : http://inthemoodforfilmfestivals.com/dans-les-medias/ . Je travaille aussi ponctuellement pour d'autres médias (Clap, Journal de l'ENA, As you like magazine etc) et je cherche également toujours à partager ma passion sur d'autres médias. Pour toute demande (presse, contact etc) vous pouvez me contacter à : sandrameziere@gmail.com ou via twitter (@moodforcinema, mon compte principal: 5400 abonnés ). Vous pouvez aussi me suivre sur instagram (@sandra_meziere).

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