ACTUALITES — 08 mars 2015

En 2013, en 2ème place de mon top cinématographique de l’année figurait un sublime film japonais « The land of hope » de Sono Sion (dont je vous propose la critique à la fin de cet article et que je vous recommande vivement), un film projeté dans le cadre du Festival Les Reflets 2015 qui met donc le cinéma japonais à l’honneur (après le cinéma allemand en 2014) dans la belle préfecture de la Mayenne, Laval(quelques-uns de mes clichés de ce beau palindrome, ci-dessous), mais aussi dans d’autres localités du département. Lavalloise d’origine, je ne manquerai pas de couvrir quelques séances.

 

Chaque année depuis 1997, l’association mayennaise Atmospheres 53 organise le festival départemental de cinéma Reflets du cinéma, qui implique l’ensemble des salles du departement de la Mayenne et réunit régulierement plus de 24.000 spectateurs.

L’objectif principal du festival Reflets du cinéma est de « faire découvrir au public mayennais des cinématographies étrangères et/ou différentes au travers d’une cinquantaine de courts et longs métrages récents. » La programmation se veut ainsi « le plus possible le reflet de la cinématographie d’un pays ou de l’ensemble cinématographique choisi, sans jamais transiger avec l’exigence de qualité » selon les organisateurs.

La programmation s’articule principalement autour de films récents, présentés en version originale sous-titrée en francais. Ces films sont pour la plupart inédits en Mayenne ou présentés en avant-première. Ils sont souvent accompagnes de rencontres avec des invités ou d’introduction par l’équipe d’Atmosphères 53. Chaque année, figurent également dans la programmation des conférences, des expositions, des spectacles…

Yasujiro Ozu, Kenji Mizoguchi, Mikio, Naruse et bien entendu Akira Kurosawa ont contribué à la renommée du cinéma japonais aujourd’hui relayés par de nouveaux  réalisateurs talentueux (Naomi Kawase, Kiyoshi Kurosawa, Aoyama Shinji, Nobuhiro Suwa, Hirokazu Kore-eda, etc) qui ont émergé dans les années 90 grâce auproducteur Takenori Sento.

L’ouverture du festival aura lieu le Mardi 17 mars a 20h a Laval, au Cinéville, avec la projection en avant-première du film inédit « Seventh Code » de Kiyoshi Kurosawa (1h, 2014) précédée d’une introduction en tambour et danse awa par le Tsunagari Taiko.

La clôture du festival aura lieu le Mardi 31 mars a 20h a Mayenne au cinéma Le Vox avec la projection  en avant-première du film « La Maison au toit rouge » de Yoji Yamada (2h16, 2015)

Parmi les temps forts du festival:

-une carte blanche à Akihiro Hata avec une soirée spéciale le mercredi 18 mars a 20h a Mayenne, Le Vox en présence de ce dernier, un  réalisateur accueilli en résidence de création par Atmosphères production.

-plusieurs soirées spéciales consacrées au jeune cinéma japonais

-une journée spéciale sur « la représentation du yakuza au cinéma ».

-le ciné-concert « L’île nue » de Kaneto Shindo

-une soirée gourmandise et cinéma

-une avant-première du film « Ningen » en présence des réalisateurs Çağla Zencirci et Guillaume Giovanetti,

-les projections de « The Land of hope » de Sono Sion

-des regards croisés « Cinéma et littérature », notamment autour de « Hiroshima mon amour »

-une rétrospective  HIROKAZU KORE-EDA

-un hommage à  KIYOSHI KUROSAWA

-des avant-premières, des films cultes du XXème siècle

-des conférences sur l’histoire du cinéma japonais

-des expositions

-un programme jeunesse

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de l’association Atmosphères 53 ( http://www.atmospheres53.org/ ) sur lequel vous trouverez toutes les informations pratiques et la programmation complète du Festival Les Reflets.

Petits bémols: le festival ne possède ni compte twitter, ni page Facebook (une idée pour les organisateurs?) et ce festival au programme alléchant gagnerait très certainement à être plus resserré géographiquement et temporellement (et, pourquoi pas, à instaurer une compétition?).

LES TARIFS

Séances de cinéma : Billet a l’unité : Tarifs habituels des salles partenaires du festival

Carnet de 4 billets non-nominatifs, valables pour tous les films des Reflets dans toutes les salles partenaires en vente aux permanences du festival a Laval, Mayenne et Evron :

Tarif normal : 22 € (soit 5,50 € le billet)

Tarif réduit : 18 € (soit 4,50 € le billet), pour les adhérents d’Atmosphères 53, scolaires, étudiants et demandeurs d’emploi.

Pass Reflets nominatif (avec photo) valable pour tous les films des Reflets dans toutes les salles partenaires : 65 €

Pass Culture Sports de la Région des Pays de la Loire : 1 coupon cinéma = 2 entrées

CRITIQUE de « THE LAND OF HOPE » de Sono Sion

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En mars 2013, le Festival du Film Asiatique de Deauville rendait ainsi hommage au cinéaste japonais Sono Sion, un hommage à l’occasion duquel a été projeté son dernier film « The land of hope »,. Vous pouvez également retrouver mon compte-rendu complet du Festival du Film Asiatique de Deauville 2013 en cliquant ici. « The land of hope » est à l’image des films en compétition de ce Festival du Film Asiatique de Deauville 2013 desquels se dégageait un désespoir commun, même s’il surpasse, et de loin, les autres films vus, et pour cause puisque c’est l’œuvre d’un cinéaste confirmé. A Deauville, il a également donné une masterclass au cours de laquelle il a notamment parlé des cinéastes français qu’il aimait : René Clément, François Truffaut, Julien Duvivier et des poèmes qu’il écrivait dès l’âge de 22 ans, rien d’étonnant au regard de son univers, certes unique mais aussi celui d’un cinéphile poétique.

L’an passé, en compétition, le festival avait projeté « Himizu » du même Sono Sion, film que je qualifiais alors d’une rageuse, fascinante, exaspérante et terrifiante beauté. Les premiers plans, effroyables, nous plongeaient dans le décor apocalyptique de l’après tsunami exploré par de longs travellings, mais le chaos n’était alors pas seulement visuel, c’était surtout celui qui rongeait, détruisait, étouffait les êtres ayant perdu leur identité et tout espoir.

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Ce nouveau long-métrage de Sono Sion commence de manière plutôt inattendu : d’abord par son classicisme (relatif, mais du moins pour Sono Sion, moins dans la folie et l’explosion visuelles, ici) et ensuite parce qu’il met en scène un cadre bucolique, des couleurs chatoyantes et des personnages heureux. Evidemment, cela ne va pas durer et la réalité, tragique, terrible, celle du Japon que Sono Sion, films après films, dissèque et dénonce, va ressurgir avec un tremblement de terre qui frappe alors le Japon. Il entraîne l’explosion d’une centrale nucléaire. Sans vraiment en donner la raison, le gouvernement fait évacuer les habitants à proximité de la catastrophe. La famille Ono dont la ferme est située à cheval entre la zone de danger et le périmètre de sécurité, doit choisir entre fuir et rester. Sono sion va alors suivre trois couples : un couple de vieux paysans dont la femme est malade, vraisemblablement atteinte d’Alzheimer, un jeune couple qui s’apprête à avoir un enfant et un autre couple en quête des parents de la jeune femme mais aussi d’un avenir.

Aux scènes joyeuses du début succède un bref et effroyable vacarme puis un silence retentissant avant que la vie et l’image ne deviennent grisâtres puis avant que les couleurs « normales » ne reviennent, plus terrifiantes encore que ces couleurs grisâtres qui les ont précédées car si tout semble banal et quotidien, la menace et le danger sont là, constants, une guerre invisible. Les « autorités » (ici traitées au début comme une dictature par définition inique et intolérante) qui ne se contentent d’être que cela ne sont d’abord que des sortes de combinaisons inhumaines et sans identité. Tout est à la fois banal et singulier, paisible et agité. Comme le titre résonne (déraisonne aussi) alors comme une ironie tragique.

Dans la beauté éclatante de chaque plan (qui n’en est alors que plus redoutablement tragique puisqu’elle n’est que le masque de cet ennemi invisible), dans son humour désenchanté (l’absurdité de cette ligne qui sépare un jardin que Tati n’aurait osé inventer et pourtant terriblement réaliste ou de ces combinaisons de protection et la paranoïa qui seraient risibles si leur existence n’était malheureusement fondée), dans sa poésie d’une beauté et d’une tristesse ravageuses, Sono Sion nous livre son cri de révolte, d’une mélancolie déchirante : révolte contre les autorités (qu’il ne cesse de dénoncer tout au long du film), révolte contre cette centrale qu’« ils » ont malgré tout construite, une telle absurdité là aussi que c’est finalement celle qui a perdu la raison qui ne cesse de la souligner.

Sans doute Sono sion décontenancera-t-il ici ses admirateurs avec ce film plus classique que ses précédents mais, comme ses autres films, d’une beauté désenchantée, d’un romantisme désespéré (cette scène où le couple de vieux paysans danse au milieu du chaos est à la fois terriblement douce et violente, sublime et horrible, en tout cas bouleversante), d’un lyrisme et d’une poésie tragiques avec des paraboles magnifiquement dramatiques comme cet arbre -et donc la vie- qui s’embrasent mais aussi un travail sur le son d’une précision et efficacité redoutables.

Un film porté par un cri de révolte et l’énergie du désespoir, plus efficace que n’importe quelle campagne anti-nucléaire et surtout l’œuvre d’un poète, un nouveau cri d’espoir vibrant et déchirant qui s’achève sur un seul espoir, l’amour entre deux êtres, et une lancinante litanie d’un pas, qui, comme l’Histoire, les erreurs et la détermination de l’Homme, se répètent, inlassablement. Et à nouveau, pourtant, la possibilité d’un lendemain. Malgré tout, malgré l’horreur encore là et invisible. Et Fukushima délaissée par les médias, autre fatalité qui se répète, peut-être plus terrible encore : l’oubli.

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Sandra Mézière

Blogueuse et romancière. Diplômée en droit, sciences politiques, médiation culturelle (mémoire sur le cinéma avec mention TB) et d'un Master 2 professionnel de cinéma. 15 fois membre de jurys de festivals de cinéma (dont 10 sur concours d'écriture). 22 ans de pérégrinations festivalières. Blogueuse depuis 14 ans. Je me consacre aujourd'hui à ma passion, viscérale, pour le cinéma et l'écriture par l'écriture de 7 blogs/sites que j'ai créés ( Inthemoodforfilmfestivals.com, Inthemoodforcinema.com, Inthemoodfordeauville.com, Inthemoodforcannes.com, Inthemoodforhotelsdeluxe.com, Inthemoodforluxe.com... ), de romans, de scénarii et de nouvelles. en avril 2016, a été publié mon premier roman au cœur des festivals de cinéma, aux Editions du 38: "L'amor dans l'âme" et en septembre 2016, chez le même éditeur, mon recueil de 16 nouvelles sur les festivals de cinéma "Les illusions parallèles". Pour en savoir plus sur mon parcours, mes projets, les objectifs de ce site, rendez-vous sur cette page : http://inthemoodforfilmfestivals.com/about/ et pour la couverture presse sur celle-ci : http://inthemoodforfilmfestivals.com/dans-les-medias/ . Je travaille aussi ponctuellement pour d'autres médias (Clap, Journal de l'ENA, As you like magazine etc) et je cherche également toujours à partager ma passion sur d'autres médias. Pour toute demande (presse, contact etc) vous pouvez me contacter à : sandrameziere@gmail.com ou via twitter (@moodforcinema, mon compte principal: 5400 abonnés ). Vous pouvez aussi me suivre sur instagram (@sandra_meziere).

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